Hafida.B

Le feu s’est déclaré en fin d’après-midi de samedi, au dernier étage de l’hôtel Hayet Regency sis au quartier  El Barki dans une zone qui a fini par prendre le nom de cet établissement hôtelier, fermé depuis plus de 15 ans. Les habitants de cette zone ceux des logements LPP, ont alerté la protection civile. Ces mêmes habitants avaient lancé au préalable une alerte sur une opération de pillage de cet hôtel. “Tout a été volé, le mobilier, la vaisselle la literie, la plomberie et tout objet se trouvant dans cet hôtel, au vu et au su de tout le monde”, se lamentent les riverains.  Ils avancent que le pillage se poursuivait même de nuit, ils voyaient de leur logement la lumière des torches des voleurs.

Les habitants de cette zone affirment que « le pillage a commencé il y a plus d’une année de cela, on ne comprend pas pourquoi les services de sécurité n’ont pas intervenus ni même le propriétaire du lieu ». En fait, cet hôtel a une longue histoire, il a été inauguré en 2005, après le Sheraton d’Oran, il devait être le deuxième hôtel 5 étoile de la ville d’Oran.

 Histoire d’un Hôtel 05 étoile devenu épave  

Hayat Regency devait être le plus grand et le plus luxueux hôtel d’Oran, situé à 7 km de l’aéroport Ahmed Ben Bella et à 5mn du centre-ville d’Oran. Situé également à 5 mn du stade olympique, cet hôtel aurait pu être un atout pour Oran, lors de sa candidature pour les jeux méditerranéens. Il compte huit étages, doté de 300 chambres, 7 suites seniors, 14 suites privilège ainsi que d’une suite présidentielle de 300 mètres carrés. Il comptait 5 restaurants, un piano-bar, trois courts de tennis, un self-service pour 200 couverts minimum et 2 salles de conférences avec traduction simultanée jusqu’à quatre langues. L’hôtel dispose aussi d’une résidence VIP de grand standing (le Château luxueusement équipé), ainsi que de plusieurs infrastructures de détente, dont une piscine et 3 courts de tennis. Le coût d’investissement, annoncé au moment de son ouverture, supporté à 80% par son ex propriétaire, est de 85 millions de dollars, soit 850 milliards de centimes, les 20% restants constituent en un crédit bancaire à long terme obtenu auprès du CPA qui devait avoir un regard sur les mouvements de fonds liés à cet établissement. La réalisation de cet hôtel a été lancée en 2000 par une entreprise espagnole. Peu de temps après son ouverture, cet hôtel qui devait garantir 450 emplois, a été au centre d’une grande affaire d’escroquerie en relation avec un « investisseur » italien, Mario Roncali, qui devait acheter cet établissement hôtelier. Cet investisseur italien a remis un chèque sans provisions de 50 milliards de centimes, au propriétaire de l’hôtel. Mario Roncali, avait fait l’objet d’une plainte pour abus de confiance, émission de chèque sans provision et vol, déposée par le propriétaire de l’hôtel Hayat Regency auprès du parquet d’Es-Senia près la Cour d’Oran. Depuis, Mario Roncali n’avait plus donné signe de vie. Il a été convoqué par la Gendarmerie nationale (section de recherche) suite à la plainte du propriétaire pour émission de chèque sans provision d’un montant de 500 millions de dinars, qui devait représenter une avance de 10% sur le prix de vente de l’hôtel, l’Italien avait demandé qu’on lui permette d’aller à son pays pour pouvoir régler la situation en procédant à un virement bancaire. Depuis, il n’est plus revenu. Le propriétaire a récupéré par la suite son hôtel mais il ne put assurer sa gestion. Il s’est retrouvé endetter jusqu’au cou. Les factures impayées d’électricité, d’eau, de téléphone, d’assurances, de fournitures se sont accumulées avec en sus un non-paiement d’impôts et plusieurs mois de salaires impayés pour le personnel. L’hôtel est entré dans une phase de chute aux enfers, avec une dégradation de plusieurs compartiments de l’établissement pour manque d’entretien et de maintenance, le vol des équipements avait alors commencé. Le propriétaire a fini par jeter l’éponge. Le 04 avril 2007, a été prononcée une décision de justice du tribunal d’Oran, au profit de l’agence 416 Khemisti du Crédit populaire algérien (CPA), en raison des créances que la banque détenait auprès du propriétaire et qui s’élevaient alors à 30 millions de dinars.

Hayat Regency, l’hôtel 05 étoiles dont devait se targuer Oran, est devenu une épave, mise en vente aux enchères à plusieurs reprises mais qui n’a jamais trouvé preneur à cause d’un montant d’ouverture des enchères trop élevé, 5.760.000.000 dinars, soit 576 milliards de centimes à la dernière enchère. Le CPA demeure le propriétaire de cet hôtel épave laissé à l’abandon et au pillage. Une enquête a été ouverte par les services de la gendarmerie à propos de l’incendie de samedi, cette enquête devra être approfondie pour démasquer les auteurs du pillage. Affaire à suivre…