Wissam Bouchri
Pour peu qu’elle soit requalifiée et modernisée, la route montagneuse reliant Oran à Mers El-Kébir via le fort de Santa Cruz peut faire fonction de voie alternative dans l’interconnexion Oran-Corniche et jouer le rôle de soupape de décompression en temps de pic du flux, comme cela est toujours le cas durant la saison estivale. En effet, pas besoin de sortir de l’Ecole supérieure des Travaux publics pour se rendre compte que la réhabilitation et la mise à jour de ce parcours apportera à n’en point douter une valeur ajoutée pour le trafic automobile entre Oran et sa région côtière ouest. Serpentant dans le mont Murdjadjo qui surplombe la ville d’Oran, ce petit raccourci qui offre une vue panoramique et un paysage à couper le souffle semble, des années durant, relégué au second plan, voire carrément tombé dans les oubliettes, à l’instar de tant d’autres liaisons routières périurbaines datant de l’ère coloniale. Pour preuve, depuis l’Indépendance, cette route n’a été destinataire, en tout et pour tout, que de deux petites simples actions d’entretien, consistant en le revêtement de sa chaussée sans aucun traitement de fond. Un changement de peau, tout au plus. Et c’est normal qu’en manque d’actes de maintenance, cette voie se trouve aujourd’hui à un degré d’usure avancé. Dans leurs divers scénarios mis au point pour résoudre l’équation à plusieurs variables de la congestion du trafic sur la ligne Oran-Corniche, responsables et techniciens du secteur local des TP ont «oublié» une alternative simple et efficace. En effet, la variante Oran/Mers El-Kébir via Santa Cruz leur est complètement passée sous le nez. Ils n’y ont même pas pensé, à vrai dire. Peut-être bien à cause de cette déconsidération à l’égard des «vieilles» routes déclassées, déchues et jetées au rebut au (faux) nom de la modernisation du réseau.Or, moderniser le circuit routier, et ce entre autres par la construction de nouvelles infrastructures routières et autoroutières répondant aux normes d’une ville en plein processus de métropolisation, ne doit pas exclure le maillon des «petites anciennes routes » urbaines, suburbaines ou rurales ? Bien au contraire, l’entretien, la réhabilitation, l’adaptation et l’actualisation de ce chaînon tout aussi élémentaire doit être au centre de tous les plans structurants et les schémas directeurs du secteur. Tel n’est pas le cas, de manière générale, pour le secteur local. Le cas Oran/Mers El-Kébir via la liaison montagneuse qui passe par le site historique de Santa Cruz est illustratif à tout point de vue. Cette belle voie légèrement sinueuse et en pente douce, longue de près de 5 km et qui débouche sur le village Dada Youm (ex-Sainte Clotide), dans le versant du village de Mers El-Kébir, se trouve dans un piteux état tant elle est livrée à elle-même. Et le rejet sur une bonne partie de sa bordure de résidus organiques et autres déchets, en provenance de hangars d’élevage et d’abattage clandestins de poulets qui pullulent dans la région, a bouclé la boucle.
MANQUE D’INTÉREÊT POUR LES VIEILLES PETITES ROUTES
C’est simple : une route non entretenue est une route abandonnée et donc un endroit propice au déversement d’ordures, en rase campagne comme en plein milieu urbain. Du moment qu’il y a une route «malade», c’est tout l’environnement local qui s’en trouve contaminé. Cela s’applique, au premier degré, pour la voie Oran/Mers El-Kébir via Santa Cruz. Cet état de fait est d’autant consternant que de l’autre bout de la chapelle de «Notre-Dame de Santa Cruz», c’est-à-dire la section Santa Cruz/Oran de la même ancienne route, la situation est tout autre. En effet, ce tronçon qui se scinde en deux branches, dont la principale va du côté de Scaléra (quartier de Sidi El-Houari) et la secondaire bifurque du côté des Planteurs, est régulièrement pris en charge en matière d’entretien : revêtement de la chaussée, installation du garde-corps, gabionnage, signalisation, éclairage ? On comprend bien que la priorité soit donnée par les pouvoirs publics à cette section routière, qui fait office de circuit officiel lors des visites des Rois et des chefs d’Etat à Oran, outre sa fonction permanente d’itinéraire desservant un circuit touristique. Mais on comprend mal qu’on ferme les yeux carrément sur l’autre segment de la même route, celui qui s’étend jusqu’à Mers El-Kébir et se connecte par la suite avec l’évitement qui se relie à la Corniche supérieure. Cela dit, on ne comprend absolument pas cette dichotomie et ce passage d’un extrême à un autre sur une portion routière de 10 km : intérêt maximal pour la 1ère moitié et zéro intérêt pour la 2ème moitié. Et ce d’autant plus que ce trajet via Santa Cruz a été renforcé, il y a quelques années, par une nouvelle voie de communication avec le réseau routier d’Oran-ville à partir de la Pêcherie dans le sillage d’un processus d’aménagement urbain de ce périmètre qui se veut une ligne de contact ville-port. En fait, selon une source fiable, il existe dans les archives de la DTP d’Oran une étude datant des années 1950 confectionnée par les services techniques français des Ponts et Chaussées sous l’intitulé «projet de la route de cote 100 » suggérant en substance de créer une Corniche supérieure bis. L’étude française propose à cet effet d’élargir, de reconfigurer et de moderniser la route de la cote 100 en vue de l’intégrer comme section intermédiaire dans un schéma routier plus global d’une nouvelle Corniche supérieure Oran/Mers El-Kébir/Aïn El-Turck via un nouvel évitement comprenant un ouvrage d’art en pont à l’effet d’enjamber la partie basse de Sidi El-Houari/Planteurs/Ras-El-Aïn.