Wassila. B
Le président Tebboune a accordé une interview au journal français L’Opinion. Parmi les sujets évoqués dans cette interview publiée hier, figure le soutien de la France, affiché en juillet dernier, pour la colonisation du Sahara occidental par le Maroc. Le président Tebboune a déclaré : « Sur le Sahara occidental, j’ai prévenu le président Macron : ‘‘ Vous faites une grave erreur ! ». Dans cet entretien au journal français L’Opinion, le président Abdelmadjid Tebboune a aussi réaffirmé son opposition à l’abrogation de l’accord de 1968. Dans un contexte de crise diplomatique inédite entre la France et l’Algérie, des personnalités politiques françaises, dont d’anciens Premiers ministres, appellent à l’annulation des accords franco-algériens de 1968 sur l’immigration. Ils estiment que ces accords sont trop favorables aux Algériens. Ces dernières obtiendraient des facilitations pour s’installer en France, même si des avocats spécialisés en droit des étrangers affirment le contraire. Si le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, ouvertement hostile à l’Algérie, milite pour son abrogation, celui des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot y est opposé. Le président Macron n’aurait pas encore tranché la question. Et pour cause : une telle décision aurait l’effet d’une bombe sur les relations algéro-françaises, déjà très dégradées.
« Pour moi, c’est une question de principe. Je ne peux pas marcher avec toutes les lubies », a-t-il répondu à une question sur les appels lancés par plusieurs politiques français pour exiger la dénonciation des accords de 1968. « Pourquoi annuler ce texte qui a été révisé en 1985, 1994 et 2001 ? Ces accords étaient historiquement favorables à la France qui avait besoin de main-d’œuvre. Depuis 1986, les Algériens ont besoin de visas, ce qui annule de fait la libre circulation des personnes telles qu’elle est prévue dans les accords d’Évian », a détaillé le président algérien. Le président Tebboune rappelle que « ces accords de 1968 sont une coquille vide qui permet le ralliement de tous les extrémistes comme du temps de Pierre Poujade ». Concernant la question des sans-papiers, le président Tebboune a révélé que l’Algérie a accordé 1800 laissez-passer consulaires en 2024. L’Algérie ne veut pas « imposer à la France des Algériens en situation irrégulière », a-t-il dit, mais exige le respect des « procédures légales » en matière d’expulsion de ses sans-papiers. « Bruno Retailleau a parlé de l’Algérie comme d’un « pays qui cherche à humilier la France » : il a voulu faire un coup politique en forçant son expulsion. Il vient d’être retoqué par la justice française qui n’a pas justifié l’urgence absolue de sa mesure d’expulsion », a expliqué le président Tebboune.
Des demandes d’extradition sans suite
Il a rappelé que Gérald Darmanin, quand il était ministre de l’Intérieur, avait tenté la même méthode avec l’Algérie. En vain. « Puis il est venu à Alger et, in fine, nous avons trouvé le bon modus operandi ». L’Algérie aimerait « aussi que la France accède à nos demandes d’extradition comme l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne. Or, curieusement, nous constatons que Paris donne la nationalité ou le droit d’asile à des personnalités qui ont commis des crimes économiques ou qui se livrent à de la subversion sur le territoire français », a-t-il dit.
Par ailleurs, le président a évoqué la dernière polémique autour des frais de soins impayés par l’Algérie. Le gouvernement algérien a décidé qu’aucun malade ne sera envoyé en France.
Les malades algériens iront se soigner ailleurs à l’étranger, notamment dans trois pays avec lesquels l’Algérie a conclu des accords : la Belgique, l’Italie et la Turquie. C’est ce qu’a annoncé le président Tebboune dans cet entretien au journal L’Opinion. Le chef de l’État a réfuté les chiffres avancés dernièrement par les médias français concernant le montant de la dette algérienne auprès des hôpitaux en France. Pour le chef de l’État, le montant des arriérés est estimé à 2,5 millions. Un chiffre identique à celui avancé par le gouvernement français cette semaine en réponse à une énième question sur le sujet à l’Assemblée nationale. « Sur les 150 millions d’euros entre 2007 et 2023 qui concernent les financements algériens, le recouvrement est assez satisfaisant puisque jusqu’à l’heure où je vous parle, il reste 2,58 millions d’euros à recouvrir. Cela concerne le système public sur lequel on a une grande lisibilité », a détaillé Yannick Neuder, ministre français de la Santé.
Selon le président algérien, ce chiffre fait l’objet d’un contentieux. « Cela fait trois ans que l’on attend une réunion avec les hôpitaux de Paris pour lever ce contentieux (…) L’Algérie a toujours payé ses dettes, mais nous ne sommes pas prêts à honorer n’importe quelle facture. Il faut que l’accueil et la prise en charge soient justifiés », a-t-il expliqué. Et d’annoncer que les Algériens n’iront plus se faire soigner dans les hôpitaux en France. « D’ailleurs, nous avons pris la résolution de ne plus envoyer nos malades en France. Ils vont dans d’autres pays européens, comme l’Italie, la Belgique ou encore la Turquie. C’est le résultat de toutes ces tracasseries que nous subissons », a expliqué le président algérien.