Meriem B  

La station d’épuration des eaux usées d’El Kerma, l’une des plus importantes de la wilaya d’Oran, fait aujourd’hui face à une baisse préoccupante de ses capacités de traitement. Jadis capable de traiter jusqu’à 280 000 m³ par jour, elle affiche désormais des performances fortement dégradées, ce qui compromet la gestion efficace des eaux usées dans un contexte de pressions croissantes sur le réseau d’assainissement.

 Face à cette situation alarmante, les autorités ont décidé de lancer une opération de réhabilitation complète de la station, pour un montant dépassant les 2 milliards de dinars. Ce projet vise à restaurer ses capacités initiales et à améliorer le rendement du traitement, afin de répondre aux besoins urgents en matière d’assainissement et de protection de l’environnement.

Une ressource stratégique pour l’agriculture

La remise à niveau de la station permettra également la production de volumes supplémentaires d’eaux traitées, destinées à l’irrigation. En tête des bénéficiaires figure le périmètre agricole de Melata, qui s’étend sur plus de 6 000 hectares, et représente l’une des principales zones irriguées de la wilaya. Ce recyclage des eaux usées traitées s’inscrit dans une démarche durable, visant à limiter l’usage de l’eau potable pour l’agriculture.

Un état critique du réseau d’assainissement

La situation actuelle de la station d’El Kerma est symptomatique d’un dysfonctionnement plus large affectant l’ensemble du réseau d’assainissement de la wilaya. Un rapport alarmant de l’Assemblée populaire de wilaya a récemment mis en lumière la vétusté des infrastructures, l’insuffisance de la capacité des réseaux et les défaillances enregistrées, notamment lors des épisodes de fortes précipitations.

 À l’échelle de la wilaya, plus de 60 % des stations de relevage, soit une soixantaine sur une centaine, sont en état de dégradation avancée. Incapables de supporter les flux croissants liés à la densification urbaine, elles aggravent les risques de débordement, d’inondation et de pollution.

 Malgré d’importants investissements pour renouveler les réseaux, les résultats sont décevants. Dans plusieurs cas, les travaux ont été réalisés sans respect des normes techniques, en l’absence de dispositifs de filtration et d’aération. Résultat : des infiltrations, des eaux stagnantes dans les grandes artères, et la diffusion de gaz toxiques et d’odeurs nauséabondes, qui ont un impact direct sur la santé des riverains. Des cas en hausse de maladies respiratoires, d’asthme et d’allergies ont été signalés dans les quartiers concernés.

Un projet pilote au cœur d’une stratégie nationale

L’opération de réhabilitation d’El Kerma s’inscrit dans une stratégie nationale visant à moderniser les stations d’épuration à travers le pays, avec un double objectif : optimiser la réutilisation des eaux usées dans les secteurs agricole et industriel, et réduire la dépendance aux ressources en eau potable, notamment dans les wilayas côtières à forte densité démographique.

 La réussite de ce projet constitue un test décisif pour les autorités locales. Elle devra démontrer leur capacité à corriger les dysfonctionnements structurels du secteur, à protéger la santé publique, et à instaurer une gestion rationnelle des ressources hydriques, à l’heure où les défis environnementaux exigent des réponses concrètes et urgentes.