Wassila. B
Dans un paysage géopolitique occidental souvent marqué par la paralysie diplomatique et la politique complice, l’Espagne fait figure d’exception courageuse et nécessaire. Sous la direction déterminée de Pedro Sanchez, le gouvernement espagnol dépasse la simple dénonciation verbale du génocide en cours à Ghaza pour engager des actions concrètes et symboliquement fortes. L’annulation récente d’un contrat d’armement de près de 700 millions d’euros portant sur des lances-roquettes de conception sioniste, suivie de l’annonce d’un boycott potentiel de l’Eurovision 2026 en cas de participation d’Israël, envoie un message sans équivoque : le refus catégorique de la normalisation des crimes de guerre et de la barbarie. Cette position politique audacieuse et cohérente n’ émane pas uniquement des plus hautes sphères de l’État. Elle puise sa légitimité et sa force dans une mobilisation citoyenne profonde, vibrante et déterminée, comme en a témoigné de manière spectaculaire l’annulation de la dernière étape de la Vuelta, dimanche 14 septembre. Ils étaient plus de 100 000 manifestants, selon les estimations gouvernementales, à bloquer l’accès à Madrid et l’itinéraire prévu pour la finale de cette compétition cycliste parmi les plus prestigieuses au monde. Leurs slogans, « Ce n’est pas une guerre, c’est un génocide » et « Halte aux morts d’enfants innocents », ont résonné bien au-delà du circuit, portant une accusation morale d’une puissance rare. Leur victoire est double : symbolique, d’abord, en forçant l’équipe Israel-Premier Tech, propriété du milliardaire proche de Netanyahou Sylvan Adams, à retirer toute mention d’Israël de ses maillots dès le 5 septembre ; stratégique, ensuite, en empêchant physiquement la tenue même de l’étape madrilène et donc la participation normale de l’équipe controversée.
Ce mouvement de protestation, qui a essaimé depuis le début de la Vuelta le 23 août, du Pays Basque aux Asturies, transcende la simple contestation sportive. Il révèle une prise de conscience collective et viscérale face à l’horreur indicible qui se déroule à Ghaza depuis octobre 2023 – un bilan effroyable de près de 65 000 Palestiniens tués et plus de 165 000 blessés sous les bombes sionistes. Le peuple espagnol, soutenu par une partie de son gouvernement, refuse que le sang des victimes innocentes soit lavé par le spectacle apolitique du sport ou de la culture. La ministre du Travail, Landa Díaz, l’a affirmé avec une clarté salvatrice : la société espagnole ne tolère pas que le génocide soit blanchi ou normalisé dans des arènes internationales. L’Espagne, en reconnaissant officiellement et précocement l’État palestinien dès mai 2024 et en condamnant sans ambiguïté les exactions sionistes dès le début de l’agression, assume un leadership moral et politique que l’Europe dans son ensemble semble avoir abdiqué. Face à la frilosité, la lâcheté calculée et le laxisme complice de nombreuses capitales européennes, Madrid incarne une voix qui manquait cruellement sur la scène internationale : celle de la cohérence entre les principes humanitaires proclamés et l’action tangible, qu’elle soit diplomatique, économique ou culturelle.