H. Nassira
La wilaya d’Oran a célébré la Journée nationale de la mémoire, commémorant les massacres du 8 mai et perpétuant le sermon de fidélité à la mémoire des Chouhada. Le Musée du moudjahid d’Oran, en tant qu’élément constitutif de la mémoire nationale, a adapté ses activités pour transmettre à son tour ce message des prédécesseurs aux nouvelles générations. Et quoi de mieux que de graver dans les annales, et la mémoire des jeunes générations, les témoignages vivants d’anciens résistants pour l’éternité. Aussi, en accueillant en la circonstance, les élèves des collèges et lycées, le musée du moudjahid poursuit inlassablement sa mission de transmettre fidèlement les hauts faits des chouhadas et des moudjahidines et les sacrifices qu’ils ont consentis pour que vive l’Algérie libre et indépendante.
Un rescapé des massacres de Sétif témoigne
La Journée nationale de la mémoire 8 mai 1945-1924 a surtout été marquée par l’enregistrement du témoignage du moudjahid Sbiya Amar, un acteur de la révolution nationale encore vivant et actif en tant que président de l’association du 08 Mai 45 section d’Oran dont le siège se trouve au sein même du Musée. Né le 1er octobre 1941 à Beni Aziz, dans la wilaya de Sétif, le moudjahid Sbiya Amar, très vite il devient orphelin suite au massacre du 8 mai et l’assassinat de ses parents. C’est la maquisarde Bendaoued Kheira, qui le prend alors sous son aile protectrice avec un groupe d’orphelins qu’elle ramène avec elle à Oran. Très tôt, le jeune Sbiya, rejoint les rangs de la résistance en s’engageant dans la branche du renseignement de la wilaya III avant d’être transféré en 1957, dans un groupe des fidayine à Oran, sous le commandement de feu Stambouli Benbaïssa, et où il va participer à de nombreuses opérations. Il sera un témoin vivant de l’attentat à la voiture piégée au niveau de la place Tahtaha à M’dina Jdida. Ce témoignage sera à ce titre enregistré sous format numérique, dans un documentaire de plus de 20 minutes réalisé par le service des archives du musée. Le moudjahid Sbyia Ammar est le digne fils du grand résistant Sbiya Essaïd, qui comptait à son actif plusieurs opérations contre la horde soldatesque coloniale. Il avait vécu la douleur et les affres des massacres perpétrés par la France coloniale qui a réprimé sauvagement des algériens désarmés qui ont célébré la fin de la seconde guerre mondiale et l’espoir de voir se concrétiser la promesse d’’un droit à l’autodétermination. Cette manifestation pacifique a été étouffée dans le sang avec la mort de 45.000 algériens et algériennes sous les balles assassines. L’histoire n’oubliera pas également la grande femme Bendaoud Kheïra, une nationaliste, qui a adopté plus de 35 orphelins des martyrs du 8 mai 1945.
Un crime contre l’humanité
En commettant ses massacres, la France ignorait foncièrement qu’elle ne pouvait pas venir à bout de la ténacité de ce peuple fier ainsi que de sa détermination à se libérer du joug colonial et ce, quoi qu’il lui en coûte en sacrifices. C’est tout le contraire qui s’est produit, ce tragique événement a réaffirmé et forgé la hargne du peuple algérien, déterminé à arracher son indépendance en dépit de la sauvagerie et la barbarie de la France coloniale. « Les massacres du 08 Mai, sont des crimes contre l’humanité, et sont imprescriptibles et ne subissent aucune atteinte du temps. Il est de notre devoir de perpétuer cet amer souvenir pour que nul ne l’oublie, particulièrement les jeunes générations »avait souligné le ministre des moudjahidines et des Ayants-droit, Laïd Rebiga, avant d’affirmer que « ces événements commémoratifs contribuent au renforcement de l’unité nationale et de la solidarité entre les Algériens ainsi qu’à promouvoir un sentiment d’identité et d’appartenance » « L’horreur des crimes commis par le colonialisme français le 8 mai 1945 doit être mise en évidence afin que les générations futures réalisent que l’indépendance n’était pas un cadeau mais a été arraché au prix fort », avait déclaré le ministre, ajoutant qu’ « il incombe au musée de raviver cette mémoire et de mettre en évidence les crimes barbares et les pratiques inhumaines du colonialisme français perpétrés contre le peuple algérien ». Pour le ministre Rebiga, « ce rôle est devenu un devoir sacré, dans lequel le Musée de la wilaya joue un rôle majeur, en rappelant les événements et en recueillant des témoignages en direct des héros ».
Des vérités historiques indéniables
Entre autres témoignages vivants, celui du moudjahid Cheikh Mohamed, dit Ouled Arab. Né le 22 février 1941 à Oran, il a rejoint les rangs de la Révolution en 1956 dans la wilaya V historique, relevant de quatrième région.
Le moudjahid naquit au sein d’une famille imprégnée des valeurs de la Révolution et de l’esprit nationaliste. Arrêté avec son oncle le 26 novembre 1960, il subit les affres de la torture avant qu’ils ne s’évadent de la prison juste avant la signature des accords d’Evian en mars 1962 et l’entrée en vigueur du cessez-le-feu.
Son témoignage a été consigné dans un enregistrement numérique de 26 minutes. Notons que le moudjahid est l’auteur d’un ouvrage intitulé « Racines de la résistance à Oran 1945-1962 » avec la collaboration de M. Tahar Touajine.
Par ailleurs, la bibliothèque du Musée du moudjahid de la wilaya d’Oran s’est enrichit d’un nouvel ouvrage intitulée « L’occupation française du sud-ouest algérien » de l’auteur Aïssa Roucham avec la contribution de Boufeldja Idrissi et de l’Association Mohamed Ouled Ali pour la promotion culturelle et éducative. La célébration des massacres du 8 mai 1945 a été également marquée, jeudi dernier, par la tenue d’une conférence historique à l’initiative de l’Office national de la culture et de l’information, en coordination avec le laboratoire d’histoire de l‘université Oran 1, du Musée du moudjahid et l’association des héros de Novembre. Les différentes interventions ont mis en exergue les visées de la France coloniale à éradiquer la fibre patriotique de la nation algérienne afin qu’elle ne constitue un jour un obstacle à ses projets de repeuplement et de conquête de la terre algérienne. Les professeurs ont décortiqué les causes et les conséquences des dizaines de crimes perpétrés contre le peuple algérien, la question des archives et de l’écriture de l’histoire et les retombées des massacres du 8 mai 1945 et le déclenchement de la Révolution du 1er novembre 1954. Enfin, à l’occasion de la journée nationale de la mémoire, la famille révolutionnaire d’Oran s’est déplacé à Sidi Chahmi, pour se recueillir à la mémoire du Chahid Kaddour Debbi, en présence de la petite fille du martyr, Djahida Kacha et des membres de la tribu des Hcham Ghraba des béni Rached. Le chahid est tombé au champ d’honneur dans une embuscade dressée par le général Desmichels, le 8 mai 1833.