O. Degui

Parler de mal-vie dans les bourgades oubliés de Tlemcen est un doux euphémisme. Le village de Marssat attend désespérément sa part de développement. Le village, relevant de la commune d’Oued Lakhdar (ex-Chouly) est perché sur les hauteurs nord d’Ouled Mimoun, à une vingtaine de kilomètres de Tlemcen. Pour accéder à ce village abritant 300 familles, il faut emprunter une route sinueuse, montant en lacets et nouvellement revêtue de bitume. La route étroite slalome sur le versant du massif forestier constitué de chênes, de caroubiers et d’oliviers. Le trajet de quinze kilomètres est en soi une épreuve : rares sont les véhicules croisés sur le tronçon de route. C’est dire l’isolement de ce village. Mohamed Aissaoui, membre actif de l’association du village de Marssat nous fait le guide. Parler de mal-vie dans ces bourgs oubliés est un doux euphémisme. Le village attend désespérément sa part de développement qui tarde à venir. Hormis la nouvelle route goudronnée, il y a une année, et la magie de l’électrification, source d’énergie mise en service il y a quinze ans, Marssat n’a pratiquement bénéficié d’aucun projet d’utilité publique, malgré le manque flagrant de commodités pour l’amélioration du cadre de vie de ses habitants. «Nous manquons de tout», se plaint Mohamed Aissaoui. Le village n’est pas alimenté en eau courante. Quatre fontaines publiques suppléent tant bien que mal au réseau défaillant d’adduction d’eau potable. L’APC a prévu de réaliser deux forages de puits artésiens, avec le concours financier des villageois qui ont cotisé une somme importante pour ouvrir une piste jusqu’à l’endroit où devait être construit le château d’eau. «Mais, depuis, les travaux ont été abandonnés», regrette notre accompagnateur. «Le wali nous a promis de régler la question du raccordement aux réseaux d’eau potable et d’assainissement. Bien que souffrant de mille maux, du problème d’enclavement à l’œil nu, le village de Marssat n’est pas classé comme une «zone d’ombre». Les villageois s’avouent perplexes. Mohamed Aissaoui continue d’égrainer un long chapelet de requêtes : «Nous avons saisi le wali par écrit et nous avons demandé une audience pour lui exposer la situation du village.
Dans cette correspondance, nous avons signalé la non-inscription de notre village sur la liste des zones d’ombre de la wilaya. Notre village est enclavé, dépourvu de toutes les commodités nécessaires à une vie décente. Notre village a été bombardé durant la guerre de Libération, a payé un lourd tribut pour l’indépendance avec 25 martyrs. Durant la décennie noire, nous avons combattu le terrorisme avec toutes nos forces et nous avons refusé à ce que notre village, dont le relief est montagneux et boisé, devienne un fief terroriste. Mais, en dépit de tout cela, le village n’est toujours pas alimenté par le réseau d’eau potable” s’est-il plaint. Les anciens puits sont, aujourd’hui, à sec. L’ex-P/APC a engagé des travaux pour un sondage, mais les travaux ont été abandonnés. Le réseau d’assainissement des eaux usées est inexistant. «Nous utilisons à ce jour les fosses septiques. Nous sommes en 2022», dit-il. La route qui relie le village à la commune de d’Oued Lakhdar, à 5 km, est dans un état déplorable et impraticable, bien qu’elle soit fortement empruntée et quotidiennement par les écoliers. Pour leur scolarité, les enfants vont à Ouled Mimoun ou à Oued Lakhdar. C’est parce que le village ne compte aucune école. Pareillement pour le gaz naturel, le réseau est inexistant. Malgré le climat et les hivers rigoureux en ces altitudes qui riment souvent avec froid glacial et chutes de neige. Cette situation a contraint des familles à s’installer dans la commune d’Ouled Mimoun et ne reviennent au village que les week-ends ou durant les vacances. La localité, qui a une vocation agricole et se prête à l’élevage, n’a pas eu sa part de développement rural. Les potentialités du site sont pourtant bien acquises. «Pour éviter l’exode et permettre aux habitants d’y vivre, nous demandons l’ouverture de pistes agricoles pour désenclaver le village et l’exploitation des terres abandonnées et éloignées, mais également faciliter aux jeunes de bénéficier des opérations de valorisation du domaine forestier”, ajoute encore notre accompagnateur.