Wassila. B
L’ONU ordonne une enquête sur l’assassinat de manifestants au Maroc qui est en feu et où le Makhzen est accusé de répression sanglante. Depuis sept jours, les rues de plusieurs villes du royaume grondent d’une colère inédite, portée par une jeunesse en quête de justice sociale et de transparence. Cette révolte spontanée, initiée par le mouvement anonyme GenZ 2012, a été accueillie non pas par l’écoute ou le dialogue, mais par une répression brutale. Trois morts, plus de 350 blessés et des centaines d’arrestations : tel est le bilan macabre d’un pouvoir répressif, préférant matraques et balles aux revendications citoyennes. Les faits sont implacables. À Agadir, les gendarmes ont ouvert le feu sur des manifestants. À Rabat et Casablanca, des fourgons ont foncé sur la foule, laissant derrière eux des corps mutilés. Les images qui circulent sur les réseaux sociaux contredisent la version officielle qui parle d’« assaut » contre une caserne : elles montrent au contraire des gendarmes tirant sur des jeunes désarmés, poursuivis dans les rues comme du gibier. Cette violence d’État, déchaînée contre ceux qui n’ont que leur voix et leur indignation, illustre la peur panique d’un régime face à une jeunesse qui ose défier l’ordre établi.
Face à ce drame, l’ONU a réagi avec la gravité qui s’imposait. Le secrétaire général Antonio Guterres a appelé à une enquête « rapide et impartiale » afin d’établir les responsabilités dans la mort des trois manifestants. Un rappel au droit international, à la dignité humaine et à la responsabilité d’un État qui prétend être un modèle de stabilité régionale.
Mohammed VI, en effet, a ignoré la colère de son peuple. Alors que les rues s’embrasaient, il a préféré commémorer, dans la solennité du Mausolée Mohammed V, le 27ᵉ anniversaire de la mort de son père Hassan II, symbole d’une monarchie autoritaire et répressive. Ce contraste – une jeunesse en sang et un roi tourné vers le passé – résume l’abîme qui sépare aujourd’hui le peuple marocain de son souverain. Le Maroc aime se présenter comme une vitrine de modernité, un pays en marche vers le développement et la stabilité. Mais derrière cette fausse façade se cache une réalité autrement plus sombre : chômage massif des jeunes, corruption endémique, inégalités sociales criantes et un appareil répressif qui ne recule devant rien pour préserver l’ordre monarchique. Les manifestants ne demandent pas l’impossible : ils réclament de la justice, de la dignité, une chance de vivre dans leur propre pays. La jeunesse marocaine, qui compose plus de la moitié de la population, refuse d’être reléguée à une génération sacrifiée. C’est elle qui descend aujourd’hui dans les rues, bravant la peur et la violence, pour affirmer que son avenir ne peut se résumer à l’exil, au chômage ou au silence imposé. Le régime peut bien multiplier les arrestations et tenter de briser ce mouvement par la terreur, il ne pourra étouffer une aspiration profonde à la liberté et à la justice.